Au coin du feu, au chalet, en regardant la neige tomber. Devant un bon breuvage, dans l’un des merveilleux cafés de Montréal. Ou à la maison, dans son cocon. En hiver, lire est toujours un moment délicieux! Alors on s’est dit que pour commencer l’année en douceur, on allait te conseiller une nouvelle batch de romans se déroulant dans notre belle Montréal. Parce que c’est toujours amusant de reconnaître les lieux, les noms, et de s’imaginer croiser les personnages. Mais aussi parce que le Québec regorge d’autrices et d’auteurs plus fantastiques les uns que les autres. On espère donc te faire faire de belles découvertes!
Mistassini, de Marjorie Armstrong
On ouvre le bal avec ce beau premier roman écrit par Marjorie Armstrong, une comédienne et autrice montréalaise. Une histoire qu’on imagine légèrement autobiographique : Margot, l’héroïne, est comédienne, et vit… à Montréal. On la suit dans son quotidien, ses peurs, ses doutes, ses rêves aussi, et on s’y retrouve beaucoup. Margot est terriblement attachante et délicieusement humaine. Margot c’est nous, c’est nos amis, et ses amis pourraient être les nôtres.
Quant à l’histoire, elle est simple, mais efficace : c’est l’été, et la gang part pour quelques jours de canot-camping sur la rivière Mistassini. Et bien sûr, rien ne va se passer comme prévu. C’est la vie : la fatigue, l’anxiété, la famille… un joyeux cocktail de non-dits qui va rendre la situation explosive. Cette histoire, on la connaît tous et en même temps, on la découvre. On pourrait l’avoir vécue, et c’est sans doute pour ça qu’elle nous touche. Et puis Marjorie est drôle, lucide, et beaucoup de ses phrases se dégustent comme des petits bonbons. On sourit beaucoup, en fait.
Extrait : (…) on part au Lac-Saint-Jean cet été. L’Argentine ou l’Islande étaient les premiers choix du reste du groupe, mais ils acceptent un nivellement par le bas, côté destination vacances, vu que je n’ai pas tout à fait le même compte en banque qu’eux. S’ils connaissaient le degré d’intensité de rouge dudit compte, peut-être qu’ils m’auraient proposé une simple balade au parc Angrignon.
Match, de Lili Boisvert
Tu as forcément déjà repéré cet intrigant petit livre jaune! Attention : dès l’instant où tu mettras le nez dedans, il y a de fortes chances que tu ne puisses pas décrocher avant la fin! Il est captivant et se lit d’une traite.
C’est une histoire simple mais – malheureusement – universelle : l’histoire d’une relation amoureuse toxique. Et Lili Boisvert écrit bien, si bien, que peu importe notre genre, peu importe notre vécu, on ne peut qu’être emporté par le récit. C’est drôle, triste, mordant, révoltant, touchant. On se répète mais c’est très bien écrit – vivant, avec un langage parlé et/ou familier qui n’empêche pas un style très maîtrisé. Alors certes, ce n’est pas du tout une lecture reposante. C’est même plutôt parfois crispant, et tu vas te surprendre à crier, voire à sacrer devant certaines scènes. Mais c’est absolument excellent. Les personnages arpentent Montréal dans tous les sens, et Lili Boisvert ne se prive pas pour citer des noms de lieux ; on y croise par exemple le Waverly, ou encore le Yïsst. Cela donne une forme ludique au livre : c’est vraiment amusant de retrouver chaque lieu… et ça contribue sans doute grandement au processus d’identification.
Haute Démolition, de Jean-Philippe Baril Guérard
Ayoye! Encore un livre sur un milieu toxique. En l’occurrence, celui de l’humour, avec l’ascension et la chute (professionnelle et personnelle) d’un jeune prodige du stand-up. Mais surtout, encore un livre captivant qui se dévore! Haute démolition est écrit au « tu » ; pour te donner une idée, essayons de rédiger ce conseil lecture dans le même style.
Tu seras intrigué par le graphisme de Benoît Tardif en couverture et par le fait que ce soit publié par les Éditions de Ta Mère (sans doute le meilleur nom du monde). Tu vas ouvrir ce livre par curiosité et puis tu vas être happé par ce style déroutant mais qui lui confère une sorte d’urgence, comme s’il fallait raconter cette histoire vite vite vite avant qu’il ne soit trop tard. Tu vas te dire que c’est original, un livre sur le milieu du l’humour et du stand up à Montréal ; tu vas surtout te dire que mon Dieu, les personnages sont vraiment horribles et détestables, ou en tous cas vraiment pathétiques, mais tu ne pourras pas décrocher parce que tu veux savoir, et parce que c’est fucking bien écrit, et parce que tu finiras par t’attacher à eux et par vouloir que ça se termine bien et que les cons tombent à la fin. Tu vas vouloir aller voir des shows d’humour et en même temps, tu ne pourras plus arrêter de te demander si ça se passe vraiment comme ça en coulisses, et tu auras sans doute envie de gifler la tête d’affiche, ou de la prendre dans tes bras, mais ce qui est sûr c’est que tu te rappelleras longtemps de ce livre.
Bonus – La Méduse, de Boum (BD)
On va terminer en douceur et avec de la beauté… mais comme souvent, la beauté va de pair avec un peu de tristesse.
La Méduse, c’est le dernier chef d’oeuvre publié chez Pow Pow, notre éditeur de bande dessinée préféré. C’est l’histoire d’Odette, qui se réveille un matin avec une méduse (une tache noire, en fait) dans l’oeil. C’est chiant, une méduse dans l’oeil. C’est gênant, c’est handicapant, surtout quand on a une vie à mener, des problèmes à régler, et puis qu’on rencontre quelqu’un d’extraordinaire. Et puis la méduse va se dédoubler. Et puis les méduses vont se démultiplier doucement au fil de l’histoire, sur quatre saisons.
La trouvaille visuelle est très belle – et ça fonctionne parfaitement. Mais, au delà des méduses, ce livre est si merveilleusement dessiné! C’est un pur bonheur de lecture. Triste, doux-amer, mais vraiment réconfortant. Dans un très beau noir et blanc, avec un graphisme où l’on sent parfois une influence manga, Boum dépeint un univers délicieusement montréalais. On y retrouve tout ce qu’on aime tant dans cette ville. C’est délicat, c’est bouleversant, et la beauté finit par l’emporter sur la tristesse. Un bel objet à offrir, aux autres ou à soi-même!
Si tu ne l’avais pas encore lu, on te conseille le tome 1 de cet article ! Et puis bien sûr, on attend tes conseils de romans québécois en retour 🙂